Lotfi Tarchouna : Décentralisation et déconcentration en Tunisie

Thèse de doctorat d’Etat en droit soutenue à la Faculté
de droit et des sciences politiques de Tunis en 2OO5.
Mention très honorable et félicitations du jury.

Le sujet est des plus classique, mais l'approche est novatrice : il s'agit de dépasser la conception purement administrative de la question, qui réduit ces techniques d’organisation administrative à être de simples instruments de gestion d'espaces locaux ou régionaux, pour mettre l'accent sur leur dimension politico- administrative.

La confrontation du modèle institutionnel au contexte aura permis de découvrir que les différences entre décentralisation et déconcentration, largement soulignées par l'analyse juridique traditionnelle, sont en réalité moins claires et moins tranchées qu'il ne paraît à première vue.

L’auteur montre, à partir des pouvoirs de contrôle reconnus aux représentants de l’Etat notamment, l'emprise croissante des autorités régionales sur les autorités locales et l'instrumentalisation des collectivités locales au service de la centralisation.

L’analyse est rigoureuse de bout en bout ; elle est servie par un appareil scientifique des plus solide ; elle se déploie en deux parties principales. Dans la 1 ère, l’auteur s’intéresse  à la question des frontières entre les deux institutions; il démontre que, loin de constituer des réalités institutionnelles différenciées, la décentralisation et la déconcentration présentent dans le paysage institutionnel tunisien des réalités très peu différenciées, caractérisées par une très large interpénétration, ce qui ne permet pas véritablement de tracer la ligne de démarcation entre ces deux modes d’organisation de l’administration régionale. Dans la seconde, l’auteur aborde, dans une perspective fonctionnelle, les rapports qui se nouent entre ces deux institutions condamnées à cohabiter sur un même espace territorial. Il relève, à partir du fonctionnement concret du système mis en place par les pouvoirs publics, le profond déséquilibre qui s’est noué au profit de la déconcentration dans la gestion et la prise en charge des intérêts locaux ; il en démonte les ressorts : politiques, juridiques et financiers pour souligner le caractère hégémonique de ces rapports.

Au total, il s'agit d'un travail monumental de 1118 pages, bibliographie comprise, riche en renseignements et en enseignements, qui se lit facilement, tant la dimension critique du sujet a tendance à prendre le pas constamment sur la simple analyse descriptive.

Mohamed Ridha Jenayah